Décrivez l’évolution des distances inter- et intra-classes, et montrez en quoi elle remet en cause la pertinence d’une approche en termes de classes sociales pour rendre compte de la société française.
Au cours des dernières décennies, on assiste à une réduction de la distance interclasses, en même temps qu’une augmentation des distances intraclasses.
En effet, il semble, d’une part, que les classes sociales se sont rapprochées entre elles à partir des années 1960. La hausse des revenus et l’amélioration des conditions de logement pendant les Trente Glorieuses ont contribué à homogénéiser les conditions de vie des classes populaires, moyennes et supérieures. La massification scolaire a également participé à l’homogénéisation des conditions de socialisation, donc au rapprochement des manières de faire, de penser et d’être.
Il semble, d’autre part, que les clivages internes aux classes sociales se sont renforcés. On peut voir là les effets de la polarisation des emplois: au sein de chaque groupe socioprofessionnel, les emplois intermédiaires en termes de qualification et de revenus tendent à disparaître. C’est ce qui amène par exemple Alain Chenu à évoquer un «archipel des employés», constitué de plusieurs sous-groupes aux qualifications et modes de vie assez distincts, notamment entre employés administratifs et employés de service. Par ailleurs, les classes sont traversées par d’autres formes de clivages liées au genre, à l’âge ou encore au lieu de résidence.
Ces constats remettent donc en cause la pertinence d’une approche en termes de classes sociales puisque les grands groupes socioprofessionnels sont de moins en moins homogènes et tendent à se rapprocher plutôt qu’à s’opposer, à l’inverse du phénomène de polarisation et d’opposition entre classes décrit par Karl Marx.