Le Pêcheur

La septième planète que le Petit Prince visita s’appelait l’astéroïde B32. Il était habité par un pêcheur. Il y avait juste assez de place pour une barque, un pêcheur et des poissons. Il n’y avait que de l’eau.
– Bonjour, dit le Petit Prince.
– Bonjour, répondit le pêcheur.
– Que fais-tu?
– Je pèche.
– Pourquoi pêches-tu?
– Pour vendre des poissons.
– À qui les vends-tu?
– Aux gens qui passent.
– Quelles gens? Les gens des autres planètes viennent te rendre visite?
– Non.
– Alors, à qui vas-tu vendre tes poissons?
– Je les vendrai à moi-même.
– C’est ridicule de  vendre ses propres poissons à soi-même!
– Non, pas du tout, regarde, je te montre : « Bonjour, comment ça va? Très bien, et vous? Qu’est-ce que je vous sers? Un poisson-chat, s’il vous plait. Voilà, ça vous fera 3 sous. Les voilà. Merci, et au revoir. À bientôt. »
Le Petit Prince souffla :
– C’est compliqué…
– Pas du tout, au contraire, c’est amusant.
– Si tu le dis…
– Cela s’appelle faire du commerce!
– Pourquoi veux-tu faire du commerce?
– Vois-tu, les poissons-chats sont plus gros, donc plus chers que le plancton : c’est donc intéressant de les vendre…
– Tu pourrais te vendre du plancton?
– Pourquoi pas? Mais mon rêve serait de pêcher une baleine turquoise : malheureusement, elles ne passent pas par ici pendant leur migration…
– Ce doit être beau, une baleine turquoise?
– Très beau!
– Et tu la vendrais?
– Oui, mais à moi-même! L’avantage de mon commerce, c’est que je ne dépense pas plus que je gagne… Mais je peux gagner beaucoup. Surtout si je pêche une belle baleine turquoise!
– Au revoir, dit le Petit Prince, qui se disait, en quittant le pêcheur : « À part l’allumeur de réverbère dont j’aurais pu être l’ami, les autres grandes personnes sont décidément très étranges… »

 

Hugo Plas (6ème – 2010/2011)