Face à moi : des barreaux, cela fait maintenant une semaine que je croupis en prison. Mon repas du soir, à peine servi, il se trouvait déjà froid. Je me souviens de la panique qui s’est emparée de moi au moment où la police est arrivée alors que je réalisais un cambriolage, mon dernier. Cela m’a rappelé la réaction de ma sœur lorsqu’elle a découvert que je lui avais dérobé son journal intime.
Ce jour-là, je gambadais dans la maison à la recherche d’une personne avec qui m’amuser. Je passais dans le couloir, lorsque j’écrasai la queue du chat qui traînait devant la chambre de ma sœur. Il miaula exagérément et partit se blottir dans les jambes de ma mère qui était à l’étage inférieur. Je tournai la tête lorsque j’aperçus par l’entrebâillement de la porte de la chambre, mon aînée, assise en tailleur sur son lit, qui écrivait sur un carnet que je n’avais jamais vu auparavant. Piquée par la curiosité, je poussai doucement la porte qui, à mon grand désespoir, émit un crissement aigu. Depuis, j’ai appris à ne pas faire de bruit en entrant dans une pièce…
Ma sœur leva brusquement la tête et me regarda, les yeux grands ouverts, amplis d’une expression que je n’avais jamais croisée à cette époque : la peur. Précipitamment, elle ferma son carnet et le cacha sous son oreiller. Elle se leva du lit et, tout en me regardant, enfila son manteau que ma mère lui avait acheté récemment et que je lui enviais tant. Elle me passa devant, sans m’adresser un mot, et rejoignit notre mère avec qui elle devait se rendre chez le médecin du village. J’attendis, assise sagement devant la fenêtre de ma chambre, que ma mère et ma sœur partent et qu’elles nous laissent la maison à moi, et à mon père qui travaillait dans son bureau au sous-sol. Je ne le savais pas encore, mais, ce jour-là, j’allais commettre mon premier vol, celui qui déterminerait mon futur de grande cambrioleuse internationale.
Le bruit du vieux moteur de la voiture se répandit, suivi d’une fumée qui s’éparpillait dans l’air. Le moment était venu, j’étais enfin tranquille, prête à découvrir ce fameux carnet que ma sœur cachait, sans aucun risque d’être repérée par mon père qui ne sortait jamais de son bureau lorsqu’il y travaillait. Je sortis de ma chambre, je longeai le couloir, orné des photos de famille, je tournai à droite, je pris un nouveau couloir, semblable au premier, et je m’arrêtai la chambre de ma sœur, sur ma gauche. La porte était déjà ouverte, comme pour m’inviter à pénétrer dans la pièce pour découvrir ce que cachait le carnet de mon aînée.
J’allai droit au but. Je me dirigeai vers le lit de ma sœur, le rythme de mon cœur augmentant à chaque pas. J’allais sûrement y découvrir quelque chose d’extraordinaire. Je m’assis sur l’oreiller moelleux de ma sœur, et, passant la main sous celui-ci, je sentis un objet rectangulaire. Il était là ! J’étais à quelques secondes de découvrir son contenu et je me sentais extrêmement fière. Je sortis l’objet de sa cachette : je fus subjuguée par la rare beauté de ce carnet. La couverture brillait, telle une pluie d’étoiles scintillante. Elle était recouverte de paillettes d’un rose étincelant. Au centre, était collé un cœur en papier d’un rose, cette fois-ci, très pâle et délicat, sur lequel ma sœur avait écrit, de sa plus belle écriture, Mon journal intime. J’étais subjuguée par la délicatesse et la raffinerie que ce carnet incarnait, ce qui changeait des simples calepins noirs que maman nous achetait pour l’école. Je me demandais bien ce que ce coffret merveilleux renfermait, d’autant plus que je n’avais aucune idée de la signification du titre que ma sœur avait donné à cet objet précieux, car je ne savais pas encore qu’on pouvait avoir l’envie de se raconter à soi-même qu’on mourrait de jalousie pour le pull de sa sœur…
J’étais prête à l’ouvrir, lorsque je découvris, pour mon plus grand malheur, qu’un objet en métal tenait fermé ce trésor. Ce fut l’une des plus grosses frustrations de ma vie, je tenais dans les mains ce carnet qui attisait tant ma curiosité, sans même pouvoir en découvrir l’intérieur. J’imaginais déjà les pages, aussi douce que de la soie, où un stylo aurait pu glisser en toute légèreté, dont les marges auraient été décorées de différentes arabesques, seulement, je ne pouvais pas en avoir la confirmation. S’il y a bien quelque chose qui me contrariait, même du haut de mes sept ans, c’était de ne point pouvoir satisfaire ma curiosité. J’étais si déterminée à ouvrir ce carnet que, armée de mes petits doigts, je tirai de toute des forces sur ce morceau de métal qui m’énervait tant, en espérant le faire céder. Rien à faire, l’affreux objet était bien décidé à me résister.
Je commençais à désespérer lorsque, une idée magique me vint à l’esprit. J’avais remarqué une fente sur le bas de ce petit objet et, j’étais à présent certaine que celle-ci de permettrait de déverrouiller le carnet, comme la serrure de la porte du bureau de papa. Je levai la tête et passai au crible la chambre de ma sœur, dans le but de trouver un objet que je pourrais insérer dans cette fente, comme la clé que papa gardait toujours dans sa poche. Il était là, l’objet que je désirais tant, posé sur un coin du bureau de ma sœur. Je me levai et allai rapidement chercher la barrette en fer que ma sœur avait l’habitude d’accrocher dans ses cheveux. Je la ramenai jusqu’au lit ce celle-ci, où se trouvait le carnet. Je pris l’objet métallique entre mes mains et j’y insérai la barrette. Je tournai, forçais, retournai la tige dans le cadenas, qui céda assez rapidement! Un sentiment de victoire m’envahit, que j’ai retrouvé ensuite devant chaque coffre-fort à la porte béante. Dans la plus grande solennité, j’ouvris le livre à une page choisie au hasard. À ma grande surprise, les pages étaient simples, seulement ornées de lignes qui étaient recouvertes de l’écriture de ma sœur. Mais que voulait-elle raconter ? Après avoir parcouru quelques pages, je fis une découverte qui changea mon monde de jeune enfant. Ma sœur avait confié à son journal un secret inavouable :elle avait volé une sucette de la boulangerie du village!
Lysandre JANDARD (3ème)