À la manière d’Albert Camus, qui raconte l’épisode du marchand de frites et les joies du groupe d’amis de son enfance (dans Le Premier Homme), nos jeunes plumes de 3ème imaginent la vie autour de La Voiture fondue de Robert Doisneau :
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[su_tab title="Lisandre Lacombe" disabled="no" anchor="" url="" target="blank" class=""]
Les petites villes précaires se faisaient nombreuses à l’époque. Seulement, dans une de ces pauvres villes, un petit groupe d’enfants arrivaient à surmonter la misère de leurs foyers, les cris de leur mère sévère, l’injustice envers leurs cadet et eux ainsi que l’éducation rude de leur père pour devenir un travailleur meilleur que leurs paternels, également pour concurrencer les autres familles et se vanter de la réussite de son enfant.
Ce petit groupe fut du même quartier, quartier qui n’était pas le meilleur. Sur la grande place sud de caillou tranchant, là où vivaient paisiblement et que la seule trace de leur passage étaient débris, déchets et même carrosseries, là où le soleil brûlait de ses chauds rayons qui apportaient une chaleureuse atmosphère et surtout transpiration aux cinq jeunes que l’on voyait toujours à jouer sur la même et misérable carrosserie rouillée.
C’était souvent Didier qui faisait le conducteur et il venait parfois à échanger avec Alain, l’aîné qui jouait le bandit avec son acolyte André montant tout deux sur la pauvre voiture. À l’intérieur, les deux filles cadettes du groupe, ne voulant pas trop s’épuiser aux mêmes choses que les jeunes hommes se contentait de s’asseoir à l’arrière sur ce qu’il restait des sièges. Léa, la sœur Jumelle d’André regardait timidement les garçons qui lui avaient donné le rôle de la jolie demoiselle, quant à Katia, la plus effrayée de la bande à propos de la carrosserie fondue, elle observait simplement les insectes se prélasser au soleil, sortant de leur cachette.
Ils rigolaient, criaient, tombaient, couraient, simulaient une bataille. Tous se sentaient riches de ce petit moment de bonheur, tous pleins de vie et d’amusement. Ce moment ne pouvait pas être omis ou même remplacé c’était leur moment à eux. À la moindre bêtise ou dispute, Alain était là pour calmer la troupe, rassurer ou réconforter les pleures, Didier lui s’assurait que tout le monde s’amusaient à cent pour cent. Alors qu’ils oubliaient toute notion de temps, ils étaient libres, ils n’avaient personnes sur le dos. Sautant de la voiture, jouant à cache-cache sur l’effroyable place ravagée. La poussière parsemant les vêtements, ces derniers mélanger à la terre et au sang de quelques-uns qui se coupaient avec les anciennes vitres en morceaux des bâtisses d’avant.
Les maisons les plus éloignées commençaient à se faire moins visible tandis que le ciel se faisait recouvrir par la douce brume qu’était les nuages, le bleu se transformant en orange puis violet. Alain marqua alors la fin de la journée en raccompagnant les plus petits chez eux arrivant lui-même souvent en retard, sa grand-mère était assez bienveillante et ne disait pas grand-chose à ses retards. Didier était lui-même encore plus en retard et n’avait pas vraiment de raison, il continuait de dire à sa mère qui l’élevait seule suite à la mort de son père, qu’il aidait Alain à raccompagner tout le monde alors qu’il traînait simplement pour profiter de l’air frais qui s’installait en soirée, et des étoiles qui veillaient sur la petite ville détruite par la guerre.
C’est donc en finissant son histoire, qu’il racontait à ses petits enfants que Didier s’exclama : « Vous voyez, estimez-vous heureux de vivre paisiblement et avec de la nourriture dans vos assiettes ! C’est papy qui vous le dis ! »
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[su_tab title="Ambre Faye" disabled="no" anchor="" url="" target="blank" class=""]
J’étais toujours avec eux, notre petit groupe était indestructible. J’avais tissé des liens tellement forts avec ces garçons que, par moments, qui devenaient de plus en plus fréquents, je me demandais si je n’étais pas plus attaché à eux plutôt qu’à ma véritable famille. Nous passions la plupart de nos journée à parler, rêver et jouer dans une voiture brûlée que nous avions trouvée quelques années auparavant.
Je ne savais pas si c’était le moment présent ou bien les personnes avec qui j’étais, ou alors peut-être les deux, mais je ressentais, à chaque fois, une immense sensation et satisfaisante sensation de bien être total et étrangement, je me croyais en sécurité, vraiment hors de danger. Nous riions jusqu’à en avoir mal aux joues et au ventre. Une fois derrière le volant de cette voiture, nous imaginions prendre la fuite tous ensemble, avoir un bel avenir peut-être même devenir d’autres personnes avec cette fois plus d’influence sur ce monde violent et injuste ou seulement devenir une de ces personnes qui se dit en se couchant, le soir, que demain sera une belle journée et qu’il n’aura pas à travailler dur pour vivre. Nous montions aussi sur le toit de ce véhicule et regardions au loin, droit devant, la tête haute. Nous passions de longues heures entières à se demander à quoi pouvait ressembler le monde, les autres cultures et parfois même l’espace. Cette hauteur nous procurait un sentiment de toute puissance et nous faisait oublier toutes ces faiblesses qui étaient en nous, comme la peur de l’inconnu ou ces pensées rationnelles qui sommeillaient en chacun.
Mais j’avais l’impression que, très vite, comme n’importe quel rêve, il prenait fin à chaque tombée de nuit, mes espoirs se brisaient. Je n’avais aucune envie, j’avais même peur de rentrer chez moi, de voir mes parents, les traits de leur visage tendus et de les aider à travailler un peu plus pour pouvoir vivre dans de meilleures conditions. Mais ces efforts ne servaient à rien. Chaque soir, avant de dormir, j’essayais de me rappeler la douleur aux joues et au ventre que j’avais ressenti plus tôt dans la journée pour avoir une bonne raison d’être le lendemain dans une vie que je n’aimais pas.
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[su_tab title="Manon Plats" disabled="no" anchor="" url="" target="blank" class=""]
Quand la guerre s’est terminée, il y avait une bande d’enfants qui était plus qu’heureux de pouvoir ressortir dans les rues sans danger, sans cette peur d’avoir un bombardement au-dessus de soi, et dans cette bande d’enfants, j’étais là. Mon nom est Marcel, j’ai treize ans, j’ai une petite sœur, Charlotte, qui a six ans.
La guerre est terminée depuis deux semaines et dans ces deux semaines, j’ai pu redécouvrir cette notion de bonheur. Je vous avoue que c’était une peur constante d’avoir des soldats allemands et des bombardements qui arrivaient constamment près de ma ville. Ce bonheur je l’ai redécouvert en allant jouer dans la décharge où on allait d’habitude. Mais cette habitude, je l’ai perdue pendant la guerre. J’avais cette bande d’amis depuis tout petit, on était cinq, cinq garçons qui jouaient dans une voiture abandonnée, qui, après la guerre, fut retrouvée à moitié fondue à cause des bombardements. Ce bonheur est revenu quand je suis monté dans cette voiture. J’escaladais pour aller sur le toit, regardais l’horizon et je croyais être le roi du monde pendant quelques minutes. J’étais fou de joie, on souriait sans penser au monde extérieur. Notre imagination était pleine d’idées merveilleuses qui nous traversait l’esprit comme un éclair fulgurant. On inventait des jeux hors du commun, on jouait sans repenser aux horreurs qu’il y avait eu il y a à peine deux semaines, sans se dire que deux d’entre nous avaient perdu leur père, oui, deux jumeaux, une mère veuve allaient continuer de vivre sans père ou conjoint. On ne parlait pas de ces choses quand on s’amusait, on riait, on dansait, criait avec une joie profonde. Ce bonheur partagé était des moments sacrés, des heures et des minutes heureuses qu’on ne comptait pas.
Dès l’arrivée du crépuscule, un de nous criait l’heure et on partait, on se disait au revoir de loin, avec nos mains, nos visages n’avaient plus ce grand et beau sourire quand on se quittait, on courait tous, très vite, on dévalait les rues à grande vitesse pour ne pas être en retard pour le dîner. On se consolait en se disant qu’on se reverrait sûrement le lendemain, avec cette merveilleuse voiture.
Aujourd’hui, je suis docteur et j’ai gardé contact avec un de mes amis, Jules, il est enseignant dans la petite école à côté de la ville et je le vois tout les samedis. Les jumeaux Olivier et Tom sont propriétaires d’un restaurant à Paris et Gérard, le plus jeune d’entre nous, vit en Angleterre où il tient une ferme avec sa femme. J’espère les revoir un jour, et j’espère qu’ils sont heureux comme avant.
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