Été 1975
Comme tous les ans, nous partons en vacances avec mon mari et mes deux fils, en caravane. Nous avons décidé, cette année, d’aller à Barcelone, pour voir la mer. Tous les matins, nous nous baignons : la plage est magnifique, le sable fin et agréable.
Été 2008
Aujourd’hui, c’est l’anniversaire de Mamie : elle nous a tous invités pour le fêter, un monde fou se presse chez elle. Avec mes cousins et mon frère, on organise une partie de cache-cache dans le jardin : pour une fois, ils sont tous d’accord !
Été 1975
Ce matin, je me rends compte qu’il me manque une boucle d’oreille : j’ai perdu une des deux boucles si précieuses que j’ai eues de ma mère, qui les avait elle-même eues de sa mère, qui en avait héritées de mon arrière grand-mère ! Toute la famille a cherché partout : sans rien trouvé… Si je l’avais perdue à la plage, jamais je ne parviendrai à la retrouver… Je n’avais pas de fille, mais j’espérais pouvoir, un jour, transmettre ces boucles à une future petite fille : c’est raté, je ne pourrai jamais lui laisser cet héritage ! Mon mari a beau me dire que ce n’est pas un drame, je reste malheureuse, désespérée, inconsolable. Tous les jours, nous allons à la plage, et, tous les jours, on nous voit nous livrer à de curieuses fouilles, retournant le sable autour de nos serviettes… Mes enfants et mon mari prennent cela pour un jeu, s’en amusent, et j’essaie d’en rire aussi, même si, au fond, je ne me remets pas de cette perte. À la fin des vacances, nous sommes rentrés, nous avons remisé la caravane au fond du jardin, en attendant les prochaines vacances d’été.
Été 2008
J’ai trouvé une cachette extraordinaire, personne ne me trouvera, dans la vieille caravane de Papy et Mamie : remisée au fond du jardin depuis des années, depuis qu’ils ne partent plus qu’à l’hôtel, elle est un peu abandonnée ! Mes cousins et mon frère ont toujours eu la trouille des araignées : ils ne viendront jamais me chercher ici ! Les voilà pourtant qui s’approchent… On ne sait jamais, je vais me cacher dans l’armoire. Au moment où je ferme la porte, le noir se fait, mais, juste avant, j’aperçois comme un éclair furtif : quelque chose a brillé dans le fond de l’armoire…
Été 2008
C’est la fête de mon anniversaire : j’ai invité toute la famille. Mes deux fils ont bien grandi et ont maintenant des enfants : une fille et un garçon pour mon aîné, un bébé pour mon dernier ! Je regarde mes petits enfants s’amuser avec leurs cousins : ils ont organisé une partie de cache-cache, et j’ai vu ma petite fille, maline, entrer dans ce qui avait été, pendant des années, notre nid pour les vacances. La caravane était maintenant bien vieille, abandonnée au fond du jardin, et je doute que les garçons aillent déloger ma téméraire dans ce repaire à poussière et à araignées. Pourtant, ils s’approchent de la cachette, mais je n’ai pas le temps d’avoir peur : la porte s’ouvre brusquement, manquant les assommer, et ma petite fille sort de la caravane en courant, sans leur accorder la moindre attention, et brandissant le poing serré : « Mamie, regarde ce que j’ai trouvé ! ». Elle tend sa petite main vers moi : à l’intérieur, j’aperçois une petite perle verte et dorée… Elle l’a retrouvée ! Sans un mot, je cours dans ma chambre chercher l’autre moitié de mon précieux bijou, je reviens vers elle qui était restée bouche bée devant ma réaction, et je lui raconte toute l’histoire de mes boucles d’oreille de famille. « Tu viens de me faire le plus beau cadeau d’anniversaire qui soit ! Maintenant, à mon tour de te faire un cadeau… ». Je lui tends les boucles, qu’elle prend avec un air sérieux et complice. « Ne les perds pas : tu les donneras à ton tour à ta fille, dans bien des années ! ».
Elsa Pimont (4ème)
